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L’EMDR est efficace dans la prise en charge du trouble de stress post-traumatique chez l’adulte

Des techniques fantastiques ? Toutes les techniques fondées sur les états de conscience modifiés, et disponibles à ce jour, ne sont pas aussi anciennes que l’hypnose et la méditation… Quelques-unes sont bien plus récentes et moins connues – et pour cause ! Leurs protocoles peuvent sembler extravagants, et ne suscitent pas facilement l’adhésion et la confiance. Parmi elles : l’EMDR (pour eye movement desensitization and reprocessing, soit « désensibilisation et retraitement par mouvements oculaires »). Une approche notamment utilisée dans le trouble de stress post-traumatique (TSPT), une maladie liée à un vécu traumatisant (accident grave, viol, attentat…) et caractérisée par des flash-back à l’origine d’une anxiété sévère, d’insomnie et de dépression. L’EMDR vise à induire un état de conscience proche de l’hypnose, afin de transformer le souvenir traumatique pour le rendre moins douloureux. En pratique, elle combine un rappel mental, par le patient, du souvenir traumatisant et des « stimulations sensorielles bilatérales alternées » (SSBA). « Il s’agit soit de mouvements oculaires induits en demandant au patient de suivre du regard un objet déplacé devant lui de gauche à droite (stylo, doigt…), soit de sons ou des tapotements (tapping), déclenchés alternativement à droite et à gauche, au niveau des oreilles et des genoux, respectivement. Ces stimulations sont appliquées pendant 20 à 30 secondes », détaille Stéphanie Khalfa, psychologue et chercheuse à Aix-Marseille Université et praticienne EMDR.

C’est en 1987 que la psychologue américaine Francine Shapiro a l’idée de développer cette technique. Selon l’anecdote, en proie à une anxiété liée au diagnostic d’un cancer, elle a constaté la disparition de pensées intrusives après avoir suivi des yeux, de droite à gauche, des oiseaux qui volaient dans un parc. D’où son idée de tester les effets d’un tel balayage oculaire chez 22 personnes souffrant de souvenirs traumatiques. Et dès cette première étude, les effets de l’EMDR s’avèrent spectaculaires ! « Une seule session d’EMDR a réussi à désensibiliser les souvenirs traumatisants des patients », lit-on dans l’article qui relate ces travaux. Depuis, ces premiers résultats ont été confirmés par de nombreux autres. Par exemple, « lors de notre étude Everest, qui a permis de tester cette approche chez 80 personnes souffrant d’un TSPT – et dont les résultats pourraient être publiés avant la fin de l’année 2022 –, au bout de 3 mois, nous avons observé une disparition des signes cliniques chez plus de 50 % des patients », illustre Isabelle Chaudieu, chargée de recherche à l’Inserm et neuropsychiatre au CHU de Montpellier. Pas étonnant, dans ces conditions, que l’EMDR soit recommandée pour le TSPT par l’Organisation mondiale de la santé, la Haute Autorité de santé française ou encore l’Inserm. Mais comment des stimulations sensorielles alternées aussi rudimentaires peuvent-elles soulager un trouble aussi grave ? « Selon nos travaux en neuroimagerie, ces stimuli activent et synchronisent de grands réseaux de neurones localisés dans des structures cérébrales impliquées dans le traitement émotionnel et la mémoire, comme le précuneus, l’insula et le thalamus. Cela favoriserait la transformation du réseau neuronal qui sous-tend le souvenir traumatique, via l’intégration de nouvelles informations.

Par exemple, le fait d’être, désormais, en sécurité », éclaire Stéphanie Khalfa. En 2019, la psychologue a proposé une nouvelle approche qui ne nécessite pas que le patient ravive son traumatisme en en faisant le récit pendant des heures au risque de déclencher des flash-back… une méthode pénible, pourtant très courante en thérapies du psychotraumatisme. Il s’agit de la thérapie Mosaic, fondée sur l’EMDR et les sensations physiques en général. Celle-ci fait déjà l’objet de plusieurs études.

EMDR : une méthode utile contre le stress post-traumatique

Aude Rambaud
Le Figaro

L’EMDR est une psychothérapie fondée sur des mouvements oculaires. Efficace contre certains traumas, elle est recommandée par les autorités de santé.

« Eye Movement Desensitization and ­Reprocessing » (EMDR), en français, désensibilisation et retraitement de l’information par mouvements oculaires : l’appellation et la méthode sont inhabituelles.

Cette approche consiste à soigner un stress aigu et des souvenirs traumatisants, en faisant bouger les yeux du patient. Les prémices de cette technique remontent à 1987 ; une Américaine, Francine Shapiro découvre que des mouvements rapides de ses yeux lui permettent de réduire l’intensité de son anxiété et de ses pensées négatives. Elle se lance dans des expérimentations et développe un protocole qui deviendra la technique EMDR, aujourd’hui pratiquée dans plusieurs pays.

Des ­études scientifiques menées par des équipes indépendantes, confirment par la suite l’intérêt de cette ­approche dans le traitement du stress aigu, notamment post-traumatique. À tel point que depuis 2007, la Haute Autorité de santé en France la recommande dans cette indication aux côtés de la thérapie cognitivo-comportementale, et la technique est reconnue par l’OMS en 2013 dans la même indication.

Soigner des personnes traumatisées

La simplicité de cette technique paraît désarmante alors qu’il s’agit de soigner des personnes traumatisées : militaires revenant du front, victimes d’attentat ou de cataclysmes naturels. Les personnes croient revivre la scène dès qu’elles sont exposées à une ­situation, un bruit ou un environnement évocateur. Leur vie se passe à éviter tout risque d’exposition à ces souvenirs, en plus de problèmes de sommeil, parfois de comportement, et de risques d’addiction.

Bouger ses yeux paraît bien dérisoire, et pourtant : « Il ne s’agit évidemment pas d’une solution miracle, mais les résultats sont parfois étonnants », commente le Pr Antoine Pelissolo, chef du service de psychiatrie au CHU de Créteil.

Une sorte «d’autoguérison du cerveau»

Alors comment ça marche ? « Les mouvements des yeux jouent un rôle capital dans le traitement des souvenirs. Pendant le sommeil paradoxal, phase pendant laquelle le cerveau intègre et traite tous les événements récents, les yeux bougent sans cesse, explique le Dr Corinne Teulières, vice-présidente d’EMDR France. Pendant cette phase, de nombreuses connexions cérébrales permettent d’intégrer les souvenirs en canalisant les émotions générées, de sorte que l’on se réveille un peu différent de ce que l’on était en s’endormant. Avec l’EMDR, on sollicite ce mécanisme, mais de façon éveillée et avec l’aide d’un thérapeute. Le patient est invité à revivre son souvenir de ­façon que le cerveau l’intègre de manière adaptée à l’aide des mouvements oculaires, jusqu’à ce que les émotions négatives associées disparaissent. C’est une forme d’autoguérison du cerveau. »

«Être accompagné d’un bon thérapeute»

La thérapie est brève et repose sur quelques séances seulement. « Sa durée dépend de l’histoire du patient, explique Antoine Pelissolo, s’il y a un seul ­événement traumatique ou plusieurs, s’il y a des comorbidités de type addiction, dépression, s’il est bien entouré ou non… »

« Dans tous les cas, la ­personne est invitée à revivre précisément le souvenir traumatique pour ­l’intégrer grâce aux mouvements oculaires et ce travail peut être perturbant, prévient Corinne Teulières. Au terme des séances, le patient doit être capable de repenser à ce souvenir sans ­ressentir d’émotion ­négative particulière ou de stress. Cette thérapie peut aider à guérir à condition d’être accompagné d’un bon thérapeute. » 

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